3/7 « Le temps chronophage nous dévore »



Et puisqu’il a fait du temps, la réflexion de l’entreprise littéraire la plus titanesque qu’il soit, voici un mot d’applaudissement de Proust adressé à Cocteau à l’occasion d’une publication de ce dernier, avec une référence (plusieurs peut-être ?) mythologique qu’aucun ne saurait méconnaître :

« Voilà, cher Jean ; c’est émouvant de penser que de cette seule fleur si belle et si douce, si innocente et si penchée que vous êtes, a pu s’élever et se construire, sans que la tige fléchît et cessât de plaire et d’être flexible, cette immense et solide et dense colonne de pensée et de parfum. »

Hin hin, plus tard est évoquée plus longuement sa mégalomanie : et comme toute maladie digne de son titre, elle tire sa force d’un symbole mythique, le complexe de la fleur penchée… Malgré tout le désir de manquant qui rongeait souvent Proust, voilà un pan certain de son existence où il aura détrôné Cocteau, du moins en ouverture : ses correspondances. Elles paraissent être toujours si joliment tournées, manipulant en cascades, d’une prose naturellement séduisante, là où Cocteau saura donner son meilleur en concentrant ses fameuses facultés délivrées en gésine, tout comme livrer un billet somme toute élémentaire. Non que la simplicité soit condamnable, il est bon au contraire, de savoir qu’un homme qui se pense un dieu peut être un homme, et que l’excellence n’est pas de tous les temps. Mais Proust ne semblait pas fournir d’effort en particulier dans ses lettres qu’il rédige avec la même constance dans la plume… Une constance semblant supplanter, voilà tout (mais le manque de documentation sur le sujet m’induit en leurre, c’est véritable).

(Après avoir farfouiné, j’ai déniché cette fructueuse page retraçant une autre correspondance de Proust, à destination de l’adroite Anna de Noailles, évoquée dans un prochain message : alors pour prendre de l’avance…)

Et grâce au jumelage temps et espace, je tiens ma transition avec le post prochain (malin devin) !

« Previous post

Leave a Reply