Month: mai, 2018

Sa vie avec Virginia

Les Belles Lettres ont pioché dans les mémoires du mari de Woolf (un volumineux journal, tenu presque aussi minutieusement que sa compagne) pour en extraire des passages éclairants sur la vie, le caractère et l’œuvre de la cheffe de file du modernisme anglais. Ma vie avec Virginia est l’occasion de découvrir la superbe plume de Leonard, qui fut ambassadeur, éditeur, conseiller politique, et son ton terriblement caustique, sans l’ombre d’un faux-pas. On perçoit en filigrane quelle émulation intellectuelle devait être leur quotidien, fait de sensibilité et de grouillements. Le livre s’oriente assez rapidement sur les crises de Virginia, puis sa maladie en général : son état empire progressivement, elle perd la tête par moments (d’où cette fameuse anecdote où elle crut que les oiseaux lui parlaient en grec, que l’on reverra dans Mrs Dalloway), et finit par être dans un tel état d’épuisement psychique qu’elle décide de faire faux-bond à son infirmière et son mari, et de se noyer dans l’Ouse, grâce au concours d’innocentes petites pierres, enfouies dans ses poches, et qui ne se remettront jamais d’avoir pris part au meurtre du génie.